Un simple diner. Un très grand diner. C'était par ce biais des plus diplomates que j'avais décidé de rassembler les quelques notables de la société mafieuse de cette ville. Mon retour n'avait pas été pleinement bien accueilli. Sorti de Blackgate pour bonne conduite, j'avais promis au juge de me tenir à carreaux, mais vous me connaissez. Vous savez que c'est quelque chose que je ne suis pas disposé à accepter de mon plein ressort. Mais comme la liberté peut être délicieuse, si vous saviez. On prend plaisir à savourer le chant d'un oiseau, la douceur d'une simple glace vendue par un de ces vendeurs ambulants, un léger coup de vent sur votre visage. Oh que oui, l'odeur de la liberté avait un goût délicieux. En tant que notable de cette ville, j'aurais sans doute réussi à planifier une évasion, mais ce serait mieux sauter pour plonger. Le salopard qui servait de héros à cette ville avait une fâcheuse tendance à empêcher les gens de voler de leurs propres ailes, mais je savais être patient. Ces longs mois au pénitencier m'avait fait maigrir. J'avais perdu beaucoup de poids, et je me sentais être proche de quelqu'un que je ne connaissais pas. Où était le ventripotent Rupert Thorne ? L'homme dont la carrure ne faisait que s'imposer dans le monde de Gotham ? Envolé, pshit ! Il ne restait plus grand chose de ce ventre que j'avais, et j'avoue que c'était assez déroutant, surtout quand on se regarde dans un miroir. Le garde à mes côtés m'attend, et un dernier regard à cette cellule, je priais intérieurement pour ne plus jamais revenir à Blackgate. Alors que je passais dans le long couloir, j'essaie de n'offrir aucun regard à ces détenus, ils savaient ce dont je suis capable après tout. Et à la réserve, on me restitue mon costume, et mes effets personnels. Une petite valise, et voila, la voila la liberté. Un dernier conseil des gardiens, et la porte se refermit.

Candice : "Regardez-moi ça les gars ! Ils font sortir n'importe qui de Blackgate ! Et bien patron, vous avez une triste mine."

"Candice ?"

Elle avait changé la chouquette. Cette jolie brune aux yeux bleus avait maintenant quelques cheveux blancs et elle avait troqué son tailleur rouge pour quelque chose de plus professionnel, moins secrétaire. Les lunettes en prime, le temps avait tant passé que ça ? Faut croire. En prison, on s'habitue à ce que ça passe lentement, on essaie de pas penser au temps qui ralentit, mais dehors, tout bouge. Elle avait dû gérer mes affaires, je ne lui en veux pas. Après tout, c'était ce que j'aurais voulu. Que ça continue, avec ou sans moi. Vinnie était là aussi, ce crétin blondinet s'était fait poussé une moustache. Il avait l'air d'un idiot. Mais d'un idiot avec une moustache, ce qui lui donnait donc l'air d'un flic. Et les flics, je peux plus les voir en peinture.

Candice : "C'est bien moi, patron. Et je ne suis pas seule. On est venu vous chercher."

Tous mes hommes de main. Vinnie, Lance, Rock, Strel, et même Big Al. Et à bord de la limousine, rien que ça. C'était une bonne nouvelle. La bande ne s'était pas dissoute, et les gars étaient venus pour me récupérer. Et au vu de l'entretien de la voiture, je n'avais qu'à passer le doigt sur la carrosserie. Polish de première main, la voiture était parfaitement briquée. Donc, les affaires semblent être bonnes. On ne peut pas laisser ce genre de détails à un vieux filou de mon genre. Je passe ma main sur la carrosserie, à peine de quoi l'effleurer, histoire de voir si le polish n'était pas une fausse apparence. Apparemment non. Candice m'invite à entrer dans la limousine. Les autres prennent une seconde voiture. Dedans, elle me sert un verre de champagne.

"Gotham Harbor, j'ignorais que des vignes poussaient aux alentours de la ville."

Candice : "C'est ma nouvelle arnaque. Je fais venir du champagne chinois et je lui colle une étiquette faite maison et je la revends à prix d'or."

"Tu as bien appris de mes combines, je vois."

Elle avait éclaté d'un petit gloussement de rire face à ma remarque. Je ne peux m'empêcher d'avoir un petit sourire, elle avait continué à faire prospérer mes affaires tant bien que mal. Et le trajet se passe plutôt bien, mais je ne peux qu'observer les dégâts occasionnés par les derniers évènements à Gotham City. Tant de choses perdues, tant de choses détruites, et Gotham changeait tellement. Candice me tient informé des dernières entrées dans la ville, et surtout, des nouveaux pans de la société, et apparemment, je dois faire une relative attention à tous ces acteurs et actrices qui ont décidé de rejoindre les rangs des familles de la ville. Je venais à peine de revenir, mais en regardant à travers la vitre de la limousine, je ne pouvais m'empêcher de penser au futur et à ce qui allait en découler. Pourquoi se faire la guerre ? Pourquoi dépenser encore, et encore des vies humaines, du sang, et de l'argent, dans des guerres stériles, alors qu'une simple union sous la bannière d'un syndicat, pourrait ouvrir une nouvelle aube dorée pour les organisations du crime. Mon esprit flanchait à ce niveau. La voiture arriva à la résidence. Elle avait souffert, elle aussi, mais des travaux étaient en cours.

Candice : "Vos vieux costumes sont toujours là-haut, patron. J'suis sûre qu'ils vous vont toujours."

La remarque me fait sourire, et je me dirige vers mon ancienne chambre. C'est comme rentrer dans un sanctuaire. Après toutes ces années de prison, c'était comme revoir quelque chose d'ancien, quelque chose que l'on avait presque oublié, mais qui offre un certain vague à l'âme. J'ouvre la penderie, et j'en sors un de mes costumes noir et vert. Candice avait reçu mes informations et mes directives quelques jours avant ma sortie. Les derniers préparatifs se devaient d'être impeccables. Descendant l'escalier dans un de ces costumes légèrement trop grands pour moi, je me dis qu'après quelques diners, je pourrais enfin récupérer la stature que j'avais auparavant. Bien manger, bien boire, et profiter des merveilles de la vie. Mais ce soir, ce n'était pas qu'un simple diner de retour. Alors que je pénétrais dans la grande salle qui avait été refaite en priorité, je remarque la belle vaisselle et les beaux décors pour cette soirée. Les invitations avaient été envoyées, nul doute que nous devrions avoir un peu de monde ce soir. Du moins, je l'espérais. Me dirigeant vers le coffre-fort de mon bureau, j'en retire une montre de gousset, une des merveilles que j'avais conservée et qui m'avait énormément manqué. Il me fallait la remettre à l'heure, et enfin, nous pouvions attendre l'arrivée des convives. Ils ne tarderont pas ... L'horloge indique huit heures. Gageons que cela soit une bonne soirée qui annonce de nouveaux lendemains qui chantent. Alors que je regarde la vaisselle, les couverts et les autres décorations, un petit sourire s'émerveille sur mon visage alors que je remarque les seaux d'eau glacés, avec du "Gotham Harbor" dedans. Candice avait une légère note d'humour pour cette soirée. C'était parfait, nous dirions. Il suffisait maintenant d'attendre ...