The Dark Knight

Malgré les évènements qui m'ont bouleversé ces dernières semaines, Gotham City se voulait être une ville toujours en activité, et même si la pénurie de carburant commençait à s'en faire sentir légèrement, aussi bien que la reprise de l'activité dans la ville, Bruce Wayne avait généreusement prêté quelques millions pour refaire certains bâtiments complètement détruits par les attaques du Gant Noir. Bruce Wayne avait été cru pour mort, j'aurais aimé que cela reste ainsi, mais Tempérance me rappelait sans cesse de fournir une tête au corps de Wayne Enterprises, et que l'entreprise familiale ne pourrait survivre sans moi et sans Lucius Fox. Soit, il était temps pour Bruce Wayne de revenir sur le plan de la scène Gothamite, et même si l'idée de rejoindre Selina à un rendez-vous romantique était presque ironique dirons-nous, tandis que les citoyens de Gotham City sont mal nourris, tandis qu'ils vivent dans un inconfort qui ne leur est pas dû, on avait encore quelques excentriques qui s'amusaient à montrer qu'ils méprisaient le petit peuple. Tandis que Tempérance me sortit un des costumes les plus propres que l'on pouvait trouver, elle me tenait une petite discussion à ce sujet.











Tempérance eut le dernier mot, et même si ce genre de pensées m'agaçait, ainsi que ces évènements ridicules, j'enfilais mon costume avant de me rendre grâce à la limousine, conduite par la jeune femme, au lieu où l'on organisait la rencontre. Le lieu avait été protégé, et le personnel avait assuré la propreté du lieu. Contrairement à Gotham City, on pourrait croire que ce lieu n'avait pas été touché par la criminalité. Le service de protection du quartier semblait efficace, mais comme toujours, ce sont les plus riches qui en disposent. Le reste de la population doit jouer de consort avec la criminalité ambiante. Quelle tristesse de voir que tout cela ne changeait jamais. Nous arrivons au Black Moon, et Tempérance me laisse là, elle attendra dans la voiture. C'est alors qu'un homme m'ouvre la porte de la salle pour l'évènement. Et ce fut alors un cri qui m'extirpa de mes pensées. La salle m'observait, comme si ils avaient tous vu un cadavre franchir la porte. Je reste sur mes gardes, les criminels étaient une chose, mais les riches, c'était pire. Une fois que vous étiez dans leurs filets, vous étiez un jouet, et il fallait être quelqu'un de rusé pour se camoufler et s'extirper de leurs griffes. Une voix, grasse, bouffie, résonne dans mon oreille. Un look excentrique qui cache une obésité croissante, une de ces femmes de Gotham City qui n'aurait jamais le soucis des fins de mois et qui n'aurait jamais à combler un vide. Façon de parler pour son estomac, au vu de la livre, elle a bien profité pendant ces derniers mois. Pense à ce que te disait Alfred, Bruce, joue ton rôle, reste Bruce et oublie Batman pour le moment, joue le dépravé et le flambeur, oublie ton rôle.





Après une dernière remarque amère, j'essaie de ne pas penser à Alfred. Le rire des gens qui m'entourent est bien ponctué. Je me serais volontiers prit de passion pour emmener le tas de saint-doux voir comment ça se passe pour les plus nécessiteux dans Crime Alley, même pour tous ceux qui étaient présents. Ils n'avaient jamais côtoyé le mal, ni le crime, ni la détresse, et pourtant, ils étaient là, tous, dans leurs jolis costumes, à se pavaner et à se complimenter les uns les autres. Ils rient tous, se moquant éventuellement des pertes humaines qui aurait pût se produire dans le Manoir. Je détestais ces gens. Si imbus d'eux-mêmes, si parfaits à leurs propres yeux, ils me donnaient envie de fuir à toute vitesse de l'endroit. C'est alors que je jette mon dévolu sur la rencontre de la soirée, Selina Kyle que je rejoins au plus vite.



Une voix qui semblait fausse peut-être, mais au final, pas du tout. La jeune femme éveille mes curiosités. Je la connaissais depuis tellement longtemps ... Elle avait une certaine chaleur, une certaine douceur dans la voix et un sourire, un sourire magnifique qui m'intriguait. Je comptais énormément de conquêtes, mais elle, elle me terrifiait car je ne savais pas encore ce dont on allait discuter et pourtant, j'étais le serpent, et elle, la joueuse de flûte, et elle commençait à m'envouter. Prenant une flûte de champagne qu'un serveur me tend, j'observe un peu le beau monde. Quelques personnes que je ne connais pas, pas encore du moins. Mais Selina m'intriguait. Pourquoi ce rendez-vous ? Ici, et là ?

The Dark Knight

Le spectre du meurtre de mes parents hantaient encore mon coeur, toujours, pénétrant, puissant, c'était ma motivation pour faire de Gotham City un endroit plus sain, plus agréable, et pourtant ... J'avais l'impression de travailler seul, d'être seul aux commandes, de ne pas avancer dans ce bourbier, et pourtant ... Selina Kyle avait toujours été la seule, elle avait toujours la seule vraie femme qui avait touché le cœur de Bruce Wayne au plus profond. Talia, Jaina, Charlotte, Madison ... Elles n'avaient fait qu'effleurer la surface, mais Selina, ça avait toujours été différent, et notre rendez-vous de ce soir me redonnait un bon espoir. Même au niveau de la ville, de ce que j'avais lu et vu pour le moment, tout avançait bien, et Gotham City semblait reprendre confiance en elle, et revoir Selina, c'était reprendre confiance en tout. Elle était celle qui me comprenait, celle avec qui je m'étais marié, celle avec qui je pouvais toujours partagé, et il y'avait toujours eu quelque chose entre nous deux. Ce petit quelque chose de sauvage, de bestial entre nous, et une passion monstrueuse. Mais elle ne m'avait jamais jugé, ... Et c'est ce qui m'attirait chez elle, elle en faisait plus que ce que Batman avait fait ... Pouvions-nous dire que Bruce Wayne était sous le charme de la belle Selina ? Peut-être, c'était pourtant certain, et pourtant, il avait peur qu'elle le déçoive. Les mois étaient passés, et elle n'avait pas redonné de nouvelles. Elle n'avait rien dit, rien laissé ... Elle était partie, sans rien dire. C'était généralement Wayne qui brisait des cœurs, et non l'inverse. C'était parfois bizarre pour tout dire les sentiments. Dans sa vie, Bruce Wayne avait été amoureux, d'abord de Julie Madison, mais la promesse de sauver Gotham City des criminels brisa cet idylle et elle partie, frustrée. Puis, c'était Vicki, et même si nous avions quelques désaccords, elle était toujours à Gotham City. Enfin, y'en a eu d'autres, mais, disons que Selina était spéciale dans un sens. Un maigre sourire, empreint de la tristesse que j'avais au fond de moi-même, même si je ne laissais rien passer, les paroles affluèrent dans sa bouche, et aussitôt, la joie que je pouvais ressentir en la voyant, s'estompa. Petit à petit. C'était bien une rupture. Une fin de mariage, la fin de quelque chose. Inspirant légèrement, j'essaie de rester impassible, de ne rien montrer.



Bruce Wayne pouvait révéler une part de lui-même, mais pas celle qui était la plus profonde. J'avais envie d'espérer quelque chose entre nous, fortement, j'espérais qu'elle ait quelques sentiments pour tout dire, mais je me devais comprendre que je ne pourrais pas la forcer. Elle avait eu de mauvais moments, et cette vie ne lui correspondait donc pas. Je ne suis pas un robot, mais au plus profond, je me sens meurtri, en tant que Bruce Wayne. Batman, dans son désir de vaincre la criminalité, s'était forgé une réputation d'être froid et dangereux, mais Bruce Wayne, lui, rêvait d'un peu de normalité. D'une vie normale, et de fréquenter quelqu'un à aimer. Et pourtant, ce ne serait pas des plus faciles ... Et ce soir, Selina confirmait ce que Batman avait accepté ce, depuis longtemps. Une vie solitaire, sans personne. C'est à croire que Bruce Wayne ne peut pas exister réellement, sans que Batman ne rentre en jeu. Qu'il en soit donc ainsi. Assis à cette table, ce jugement me rend amer, non, ce n'était pas un jugement, c'était un constat. Un constat difficile à encaisser, pénible. Fermant les yeux, un laps de temps, je pèse mes mots, avant d'être vraiment dans mon esprit de Bruce Wayne. Bruce Wayne lui, avait encore un peu de sentiments, même s'il s'était juré de ne plus jamais aimé qui que ce soit. Pourtant, avoir Dick ou Tim sous son aile lui a quand même permis d'ouvrir son cœur et ses états d'âmes, et ce n'était pas simplement pour eux, mais aussi parce que les Robin, quels qu'ils fussent, le rendent humain, rendent Batman humain, sur un certain point qui pouvait paraitre étrange.



Alfred m'avait longtemps conté ses aventures dans le domaine du spectacle. L'intonation, la voix, les paroles, tout cela avait une incidence. La parade amoureuse par exemple, tout était question de séduction, de mots qui font fondre les cœurs, et de doux sentiments mis à nus pour exprimer ce que l'être humain voulait ressentir. Bruce Wayne pouvait montrer des qualités, des sentiments, de l'émotion, mais jamais Batman, et c'était mieux ainsi, le Yin et le Yang en un seul être, un homme capable de mener deux vies biens distinctes. Mais une telle façon de vivre n'était-elle pas monstrueuse pour l'âme d'un Homme ? Bonne question. J'essaie de contenir ce que je ressens, de l'enfermer dans une boite et ne plus y penser. Elle était ma femme, et ce soir, elle ne le serait plus. C'est cette tristesse qui se loge dans mes yeux, une tristesse que peu de gens peuvent voir en moi. C'était un maigre sourire, et c'était déjà pas mal. Depuis la mort de mes parents, les rires que je pouvais avoir n'ont plus jamais résonné. Je ne prends plus les blagues et les jeux comme avant. Et là, une fois de plus, Bruce Wayne commence à se renfermer, une nouvelle fois. Inspirant légèrement. J'étais en pleine déconvenue, et pour tout dire, les choses ne tournent pas comme je l'espérais. Revoir Selina au gala m'avait redonné foi en l'avenir, mais là, j'avoue que je commence à douter de l'existence même d'une vie heureuse pour Wayne. Selina ... Si même toi tu ne peux plus rien ressentir pour moi ...



La fin de notre histoire fera sûrement la presse heureuse de toutes les connivences médiatiques que cela peut engendrer. Bruce Wayne était connu pour être un homme à femmes, pour avoir toujours une poule dans chaque port, mais on l'avait aussi marié à de très nombreuses femmes, uniquement dans la presse à scandales si vous voyez ce que je veux dire, donc en somme, on ne pouvait vraiment se faire une idée réelle de qui était vraiment Bruce Wayne au plus profond de lui-même. La seule chose qu'on avait réussi à pousser, c'était qu'en tant qu'orphelin, il se consolait à oublier sa terrible épreuve dans l'enfance en trouvant le bonheur dans les bras d'une femme. Un psy avec un nom étrange en avait même conclus que je souffrais d'un syndrome d’œdipe et que je recherchais, surement, dans mes fantasmes, à retrouver ma mère, celle que j'ai perdu, dans les autres femmes que je fréquente. Mais Selina venait de me porter une estocade fatale. Le cœur de Batman ne pouvait pas être détruit, mais celui de Bruce Wayne, si. Une seconde fois.

The Dark Knight

Pouvait-on comparer cela à cette histoire : La Belle et la Bête ? Elle dans le rôle de la Belle, douce, innocente, et intriguant ? Et moi dans le rôle de la bête, me dissimulant sous une cape qui n'est pas vraiment moi ? Pouvait-on vraiment le dire ? Dans un sens oui, après tout, nous étions dans un manoir, et ça y ressemblait un peu quand même. Elle était ma Belle, je serais sa Bête. Et que dirait Batman à ce sujet ? Devrais-je fermer à jamais la Batcave ? Devrais-je mettre fin au Chevalier Noir pour assurer mon bonheur ? Peut-être ... Peut-être que j'avais besoin de vraiment vivre ma vie, et de laisser James Gordon aux commandes, peut-être que je devrais laisser Nightwing et les autres devenir des héros à ma place. Peut-être ... Non. Tout ça ne se produirait pas. Jamais. C'est ainsi. Le baiser que nous échangions n'aura duré qu'un infime moment dans nos vies. Elle s'excuse, se reprend, et elle me laisse là, seul, comme toujours. Au final, je m'y attendais. Batman me punissait-il pour avoir espérer ne serait-ce qu'un moment avoir voulu être heureux. Je devais rester fort, et ne surtout rien montrer à Selina. La situation est embarrassante, je l'avoue. Un baiser, rien qu'un seul, et tout s'envole, pour de bon. Elle ne sera pas à moi, jamais. Je serais condamné à errer, entouré de femmes aussi idiotes qu'inintéressantes, sans compter celles qui voudront ma peau. Bruce Wayne ne serait jamais heureux, autant refermer mon cœur une bonne foi pour toutes. Gotham City serait ma seule maitresse au final, et jamais plus, je ne désirerai aimer quelqu'un. Cela ... Ne ... Servait ... à rien au final. Je reste là, planté là, à l'écouter, à vrai dire, je comprenais parfaitement ce qu'elle voulait dire, elle s'était engagée, à quelqu'un. Non. Elle s'engageait dans cette vie qu'elle aimait, pas auprès de Bruce Wayne. Il y'avait un peu d'amour, mais ça ne serait jamais une vie normale, jamais. Soit, je respecterais sa parole. Je ne dis rien, je ne pense rien, mais j'en ai quand même gros sur le cœur. Bruce Wayne doit se ressaisir, il n'a pas à souffrir d'une rupture de cœur, d'une relation. Elle m'explique certaines raisons, elle m'explique ce qui se passe dans sa vie, très bien, je le comprend tout à fait.



Dis-je d'une voix neutre et glacée. Je n'allais pas faire une exhibition de mes sentiments comme cela, je savais reconnaitre que j'avais perdu, et je garderai la tête haute, bien sûr. Le froid, la glace. Je ne pleure pas non, j'ai cessé de pleurer le jour où mes parents sont morts. Et il en faut plus pour briser Bruce Wayne. Je crois que, comme pour Andréa, comme pour Julie, je crois que la troisième fut la bonne, et que je pouvais décemment enterrer ma vie amoureuse. Bruce Wayne finirait seul, seul avec sa famille reconstituée, mais jamais il ne pourrait ressentir de véritables sentiments, exceptés ceux qu'il avait pour ses fils d'adoption. C'était compréhensible. Selina aimait sa vie d'avant, et malgré ce que nous avions vécu, tout ça n'avait pas compté pour elle au final, et c'était comme ça. Il fallait se faire une raison. J'aurais aimé dire quelque chose, mais je manque de bons mots. L'humour n'était pas des plus appréciables à ce moment bien donné.



Je me dirige d'un pas hâtif vers la sortie, quelques minutes après son départ. Je sors dans la rue et je me dirige, nonchalamment vers une de mes caches dans la ville. Le cœur lourd, brisé, je préfère ne rien dire. Dégrafant ma cravate, je la jette dans la plus proche poubelle. Généralement, c'est moi qui brise des cœurs, mais là, pour le coup, je me sentais, touché ? Non, meurtri. Ce qui restait du peu de sentiments que Bruce Wayne avait au fond de son âme était mort ce soir. Mort avec cette soirée. Alors que je descends dans une de mes caves improvisées sous la surface de la ville, j'essaie de ne plus penser à ça, j'essaie de ne plus penser à elle, j'essaie d'oublier. Je retire mes vêtements et j'endosse le costume de Batman, il ne me restait plus que ça, au final, il ne me restait plus que mon côté obscur, il ne restait que mes actes en tant que chevalier de la ville, en tant que champion de la justice. Je regarde, une fois habillé, les différentes missions qui m'attendent, le souvenir de Selina se dissipe, je n'y pense plus, je n'y pense plus. Et pourtant, c'est bien une larme qui coule et qui sort du masque. La goutte tombe et la source se tarit. Bruce Wayne n'avait plus rien à espérer de ce monde. Seul comptait le Chevalier Noir. Je n'aurais jamais de véritable vie normale. Mais c'était un sacrifice pour ma ville. Batman ne pouvait pas s'arrêter, il ne s'arrêterait jamais. Jamais. Mes parents comptaient sur moi, était-ce un coup du hasard ? Ou un bref retour aux choses normales ? Devais-je encore payer la mort de mes parents en étant Batman ? C'était ce que je semblais croire. Condamné à être Batman, une malédiction ? Sur certains points, oui. La voix de Tempérance résonne dans mon casque. Elle avait tout entendu, on ne sait jamais, grâce aux micros et aux détecteurs de ton. Je préférais tout garder par enregistrement, pour voir si je ne suis pas en face d'un illusionniste ou d'un Clayface. Mais ce soir, je doute que c'était Basil Karlo qui était en face de moi. Non, c'était bel et bien Selina ...







Sans plus tarder, je termine de m'équiper et je me dirige vers la Bat-moto. Accessoire bien plus pratique dans une ville en décomposition lente et désorganisée. Le Batman allait appliquer une vengeance monstrueuse, et ceux qui croiseront ma route allaient très clairement comprendre qu'il ne faut pas m'ennuyer ce soir. J'avais la haine. Quant à moi, la moto démarre et fonce à travers le tunnel sombre et humide. Toujours, et encore, vers une nouvelle mission. Sans cesse.