The Dark Knight

Un retour difficile à la Batcave ... Les derniers évènements m'avaient conduit à plonger tête la première dans le vide, avec Hurt dans les bras. Nous chutâmes longuement, avant de nous écraser sur un chantier abandonné aux abords de la mairie. Tous les deux nous fûmes trop blessés pour continuer à nous battre. Mais je ne pouvais pas le laisser vagabonder éternellement dans ma ville, surtout avec ce qu'il sait. Et après ce qu'il avait fait. Gotham avait souffert. Azzura avait souffert. J'avais souffert. Tout le monde avait souffert à cause de lui. Alors qu'il était encore évanoui à cause de notre combat, je le fixe, haletant, ma colère se calmait, mais je repensais sans cesse à Alfred. Tué pour rien. Tué à cause de la folie d'un homme qui se prétendait être Thomas Wayne. Alors qu'il était allongé, inconscient, sur ce tas de gravats, je me redresse et je traine son corps jusqu'à retrouver la Batmobile, plus loin. Quel était le sort qu'il méritait au final ? Il méritait celui de mon plus vieil ami : Thomas Elliot. Hissant son corps, je le ligote et je le menotte dans le coffre la Batmobile stationnée dans une de mes caches secrètes dans la ville. M'installant à mon cockpit, je souffle, j'exhale, tout en fermant les yeux. Un peu de répit, enfin ... Et pourtant, rien n'était fini. Je devais continuer à avancer. Direction l'asile d'Arkham abandonné. Passant les grilles, je ne doute pas que l'activité y reprendra vie très bientôt, et que l'établissement aura déjà un de ses pensionnaires. Au moins un. Alors que je débarrasse Hurt de certains éléments de son costume, de certaines armes, je l'enferme, toujours inconscient, derrière la vitre opaque d'une cellule. Il y restera, à jamais, oublié de tous. C'était le seul destin qui l'attendait. Il pourrait très bien crier que Bruce Wayne est Batman, jamais personne ne le croirait. Un destin où la folie l'aura à jamais emporté. Quelques vivres de disposées dans sa cellule, le temps qu'il tienne à l'arrivée du personnel médical, et c'était déjà assez de charité pour ce monstre. Je n'ose même pas le regarder, je ne lui ferais jamais ce plaisir, alors qu'il semble émerger de sa torpeur, et qu'il commence à comprendre où il se trouve.



Dis-je avec un relent de colère dans la voix, avant de fermer la cellule à double tour. Arkham Asylum : Un seul passage à l'intérieur peut vous y rendre fou. Et un séjour prolongé vous fera sombrer dans l'oubli à jamais. C'était la meilleure des choses à faire pour une ordure comme lui. Il ne serait plus qu'un patient parmi tant d'autres, plongé à jamais dans un monde de folie. Un seigneur de guerre, oublié. Mais la plaie qu'il avait ouverte était toujours vivace, et ne se refermerait sans doute jamais. Il me fallait du repos, beaucoup de repos. Les derniers évènements furent éprouvants, et je comptais bien sur Dick, Barbara, et les autres pour tenir la ville, au moins un jour. Sur le trajet, je pouvais apercevoir le manoir Wayne, et ressassant les souvenirs, une étreinte me percuta le cœur. Jamais plus, je n'entendrais la voix d'Alfred avec ses petites manies. Jamais plus, je ne pourrais avoir le léger sarcasme qu'il me procurait à chacune de mes visites nocturnes dans le monde affreux qu'était Gotham City. Alors que la Batmobile empruntait le chemin dissimulé, ce retour à la Batcave avait un goût amer. Alfred n'était plus là, et je ferais en sorte que son souvenir, jamais ne s'efface. Alors que la Batmobile s'arrête, j'en descends. Retirant mon masque et ma cape, je m'approche du bat-ordinateur. Plus jamais, je n'entendrais le cliquetis du service à thé d'Alfred qui s'approchait. Plus jamais, je n'entendrais ce son étouffé qu'il avait, quand il me rouspétait de ne pas prendre ma collation du soir. J'ai ce besoin d'extérioriser tout ça, mais je n'y arrive pas. Retirant ma tunique, je fonce vers le premier mannequin d'entrainement qui me vient en premier, et je le frappe. Je le frappe jusqu'à ce que mes poings saignent. Alfred était mort, et je n'étais pas arrivé à temps. Les coups suivants continuaient et du sang perlait sur le mannequin qui prenait toute ma haine, toute ma colère en lui. Il est temps, et le mannequin avait salement souffert, mais mon âme n'était pas guérie pour autant. Non. Elle ne le serait jamais. Les heures passent, et je martèle chacun des mannequins de l'entrainement. Je ne compte plus les secondes, les minutes, les heures. Mon âme a besoin de ça, elle a besoin de se soulager. J'aurais dû faire plus. J'aurais dû faire mieux. Plongé dans ce monde de la routine, où mes coups se suivent et où la douleur s'intensifie, je perçois quelque chose ... Des pas. Alfred ? Non, ma conscience me joue des tours. Qui ? Dick ? Tim ? Qui ? Une voix s'élève enfin.





C'était une voix douce, calme, empreinte d'un certain rire dans la voix. Une certaine joie de vivre qui m'avait plus à l'époque. Je n'avais pas prononcé ce nom depuis des années. Et cela faisait longtemps qu'elle n'était pas venue à Gotham City. Pas depuis notre dernière rencontre. Elle m'avait dit qu'à l'époque, elle voulait retrouver une certaine stabilité, une certaine raison à sa vie actuelle. Je ne lui en ai jamais voulu. Mais si elle était là ... Prenant une serviette pour m'essuyer le front et les mains, je macule de sang, ce qu'il restait de ce suaire défraichi par les années d'entrainements.









Elle le savait mieux que quiconque, comme Dick, ou encore Tim, et même Jason. Elle avait aussi le don pour être directe, et avec un soupçon de chamaille dans la voix. Chacun de ceux que j'avais accueilli, chacun de ceux qui avaient rejoint mon combat avaient perdu énormément. Tempérance n'y avait pas fait exception, et même si elle fut dans mon sillage pendant peu de temps, elle avait compris l'importance d'une famille. De ce que je savais, elle était partie vivre à Starling City où elle avait fondé sa propre clinique vétérinaire. Elle avait évolué. Comme beaucoup parmi nous. J'inspire légèrement, calmant mon cœur. Je l'observe. Ses traits avaient légèrement changés. Fatigue, cernes, et l'âge aussi, mais elle était toujours aussi enjouée que la première fois que nous nous sommes rencontrés. Elle s'avançait vers la vitrine des costumes, avant de s'attarder sur le sien, que j'avais conservé il y'a longtemps.



Je ne dis rien face à ça. Je peux comprendre qu'on ait l'habitude de quelque chose et qu'il est difficile pour nous de le perdre. Moi aussi j'avais du mal, mais je laisse un silence entre nous deux. Tempérance. Alias Midnight. Jeune fille des rues qui avait toujours eu cette petite joie de vivre en elle. Joueuse, parfois très têtue, mais qui avait foi en cette ville. L'avait-elle perdue avec le temps ? Je ne m'étais jamais posé cette question jusqu'à maintenant. Elle quitte la vitrine, pour plonger ses yeux verts droit dans les miens.



Un déclic ? Avait-elle vraiment besoin de moi ? Ou bien avais-je besoin d'elle ? J'avais encore Azzura à former, mais Tempérance connaissait le métier. Et elle avait aussi aidé les Birds of Prey, pendant un petit moment. Le moment pour moi était venu de constituer une équipe fiable, sur laquelle je pouvais vraiment compter. Mais pourquoi ce retour si soudain ? Techniquement, je pourrais très bien faire fermer le manoir Wayne, dire que Bruce Wayne s'en va pendant un très long moment, et ne plus jamais le faire revenir sur la scène Gothamite, ce qui pourrait m'arranger énormément. Non ... La fondation Wayne avait besoin de Bruce Wayne, et des gens dépendaient de moi. Beaucoup. Un départ de Bruce Wayne pourrait être dévastateur alors que la ville a besoin d'espoir. Si Bruce Wayne part, la ville sera définitivement perdue. Il faut que Batman existe, mais que Bruce puisse lui aussi apporter la lumière aux ténèbres du Batman.





Elle marquait un point, et malgré tout, je n'aimais pas ramener des gens dans cette voie que j'avais choisi. Elle pouvait risquer autant qu'Alfred. Mais elle connaissait les risques, murmurait cette voix au fond de mon esprit. Mais le doute, le doute subsiste dans mon esprit. Je regarde le dernier mannequin qui tient sur pied, et d'un geste de la jambe, le mannequin tombe à terre. D'un regard posé sur la chose que j'avais mis à terre, je reprends, d'une voix un peu plus calme, et posée.



Malgré le fait que je n'aimais pas qu'une ancienne qui a raccroché reprenne son masque, il fallait quand même l'avouer, elle avait toujours eu cette joie qu'elle partageait en point commun avec Dick. Ce qui rendait la chose plus douloureuse pour moi, de la savoir à nouveau en première ligne. Le manoir Wayne devait reprendre vie. C'est ce que Alfred voudrait. C'est ce qu'il aurait toujours voulu. Que l'espoir continue à fleurir, au milieu des ténèbres. Toutes ces années où Dick, Jason, Tim et Damian ont vécu dans ce manoir. Tous ces souvenirs ne peuvent pas s'effacer comme ça. Pas comme ça. Alfred mérite que ces murs continuent à vivre, pour lui, pour moi, et pour l'âme des Wayne. J'avais besoin de ça. Un dernier regard vers Tempérance, elle qui revenait dans ma vie. Beaucoup de gens reviennent toujours dans cette vie que j'avais façonné, mais de toutes les personnes que j'avais côtoyé, je ne pensais pas la revoir un jour. Elle était de retour, et comme quand je l'avais rencontré pour la première fois, il y'avait dans ce regard, cette étincelle qui indiquait qu'elle pouvait tout faire, tout réussir. Peut-être qu'elle m'aidera du mieux qu'elle le peut. En attendant, je devais songer à élargir mon cercle. Dick avait pris son envol, et Barbara était partie. Il ne restait que peu de justiciers à Gotham City, et je devais faire en sorte que notre nombre évolue, en positif. Un dernier regard vers Tempérance, et je lui tend ma main.