Les murs insonorisés coupent le studio des staccato incessant des armes automatiques.
Loin en dessous, les rues sont devenues un champ de bataille à ciel ouvert. Dans les ténèbres d’une Gotham plus sombre que jamais, la morte rôde, seulement éclairée par le flash de fusil d’assaut les faisceaux aveuglant des lampes torches. Au dix-septième étage d’un des immeubles les plus récents du district, le duplexe du Puppet Show est, comme l’immense majorité de Gotham, privé d'électricité. Les larges baies vitrées sont obscurcies par d’épais rideaux métalliques de sécurité, descendus immédiatement avec la disparition du courant, une installation visant à les protéger de toute intrusion justicière malvenue qui désormais, les coupe des quelques lueurs que le ciel nocturne peut offrir.
“
Il va falloir que l’on se prépare…”
Iris a du mal à s'adapter à la voix naturelle de sa patronne, le timbre devenu parfaitement humain la dérange profondément après les mois passés à ne l’entendre qu'à travers la déformation synthétique de son modulateur. Strings lui paraît soudain beaucoup moins… fantastique, se tenant devant l’équipe sans son masque réfléchissant, son identité protégée par l’une des cagoule de l’équipe technique et la rareté lumineuse.
Leur seule source de photon actuelle est la lampe torche de l’un des portable sur laquelle Stephen a posé une bouteille d’eau - tout en leur expliquant que la réfraction en ferai une meilleur lampe et tout un tas de détails inutile… qui en a quelque chose a foutre qu’avec un peu de javel son “life hack” marche encore mieux ? C’est la guerre dehors, nerd !
“
Je ne pense pas que cet immeuble soit une cible, c’est un complexe de bureaux, mais je ne compte pas parier ma vie là dessus.”
Les autres membres de l’équipe hochent lentement la tête autour de la table et la tension est palpable. On ne peut pas vraiment dire que qui que ce soit dans la pièce soit étranger à la violence - même si la majorité est vécue à travers un écran - mais il y a une différence massive entre enlever des futures marionnettes et se retrouver plonger dans l'équivalent d’une guerre civile.
“
Le studio est relativement sécurisé, rien qui pourra arrêter un groupe motivé et équipé… et qui que ce soit qui ai provoqué ce bordel possède clairement l’envie et les moyens.”
Iris lance un regard vers les lourds panneaux d’acier qui se sont empilés entre eux et les vitres - pour éviter que le verre ne soit projeté vers l'intérieur en cas de choc - comme si elle pouvait voir à travers le métal vers la Gotham enténébrée.
Cette ville a l’habitude de faire face à des menaces de taille, des tentatives d'empoisonnement des eaux de la ville aux guerres de gangs enflammant toute la ville… mais personne n’a jamais réussi à provoquer ce niveau de chaos aussi vite. Derrière elle, les autres membres de l’équipe vont rapidement l’inventaire de la nourriture présente, un constat des plus déprimant : une douzaine de paquets de barres protéinées, deux sachets d’amandes, des chips en tout genre et quelques paquets de gâteaux. La majorité du temps, le Puppet Show se contente de commander un buffet dans les restaurants alentour, chacun prenant le temps de manger dans l’une des alcôves privées ou bien se contentant de relever leur masque pour ne pas perdre de temps. Les réserve de boissons sont un peu mieux, les locaux se méfiant de l’eau courante, une palette d’eau en bouteille est livrée régulièrement, s’y ajoute quelques bouteilles de soda, des boisson énergisante et une réserve de grain de café aussi utile que leur machine dernier cris désormais coupée du courant.
La voix du “gardien” s’élève ensuite, étrangement calme.
“
Il nous reste aussi quatre marionnettes et cinq chiens, que l’on avait préparées pour la prochaine émission. Je pense que l’on peut les garder quelques jours sans manger, mais elles vont vite perdre leur efficacité.”
Iris est parcourue d’un frisson. Ce mec a toujours eu le don de lui foutre les jetons.
Certes, elle travaille pour une super-vilaine de Gotham - c’est elle qui insiste sur le terme - qui prend le contrôle des gens pour l’amusement d’internet, mais ce gars les nourris, les lave et les habille et même dans la pénombre, la jeune femme peut voir l’absence totale d’émotion dans les petit yeux porcin de son collègue.
Strings pousse un grognement de frustration.
“
On va essayer de les rentabiliser le plus vite possible, ce ne sera pas possible de les garder si la coupure dure plus de quelques jours de toute façon, les modules de contrôle tomberont à court de batterie… C’est pour cela que nous devons faire notre sortie le plus vite possible.”
Des regards inquiets se croisent, mais personne n’ose lever d’objection.
* * *
Un tir de fusil à pompe fait voler la porte magnétique en arrière.
Le hall de l’immeuble abandonné et parcouru par la lumière aveuglante des lampes torche, passant rapidement sur le plan de secours et le panneau indiquant quelle société se trouve à quel étage, illuminant le décor futuriste tout d’acier et de verre et la sculpture abstraite qui décors le centre de la pièce immense. Les bottes militaires claquent sur le sol de marbre alors qu’une vingtaine de silhouettes envahissent les lieux, fouillant chaque recoin, leurs armes braquées vers chaque cachette potentiel et leur visage totalement obscurci par des masques monstrueux.
Le crachotement d’une radio à onde courte, un échange de mots étouffés, puis le groupe se remet en mouvement, deux paires de gargouilles se postant derrière le bureau de l'accueil, leurs armes braquées vers l’entrée et leur lampes éteinte alors que le reste se divise en deux groupe de huit pour prendre chacune des cages d’escaliers.
L’immeuble est de trente trois étages.
Les portes sont ouvertes par la clef universelle qu’est le calibre 12 et les petit soldats font rapidement le tour des lieux, lampes torche et armes braquées vers chaque porte, chaque bureau. Au troisième étage une rafale résonne à travers tout l’immeuble alors que le sang et la mort éclabousse la moquette d’un notaire un peu trop tardif, son épais bureau de chêne s’étant avéré une cachette insuffisante. Une rapide question sur la radio, une réponse amusée, le balayage reprend.
Le douzième étage, les jambes commencent à brûler, les souffles sont un peu plus courts et deux pauses ont déjà été faites pour s’hydrater et recharger leur porte-clef à poudre.
Le premier groupe est en train de gravir les dernières marches, gardant l’oreille attentive pour leurs proies éventuelles.
C’est le meneur du groupe qui l’entend en premier, dressant immédiatement un poing pour avoir l’attention du groupe.
Comme une série de tapotements, de plus en plus fort, trop léger pour être la course d’un homme. Quelque chose se rapproche.
Les armes sont relevées vers le reste de l’escalier, les lampes se superposant sur les marches métalliques et les murs blancs, certaines se perdant dans les hauteurs de l’immense cage d’escalier. Une exclamation, des ombres entraperçues entre les marches, les yeux se lèvent, les armes parcourent les hauteurs.
Un chien bondit soudain de la rambarde, plongeant vers le groupe. L’animal est étrangement silencieux, pas de grognement, seulement le halètement rauque de son souffle. Son cou est entouré d’un collier métallique massif. Deux autres le suivent rapidement, les gueules entrouverte sur des crocs que la lumière rend presque luisant.
Malgré la surprise, la poudre répond immédiatement, des flash aveuglant jaillissant des canons, les casques protégeant leur porteur du bruit assourdissant et de ses échos. La majorité des tirs se perd dans l’acier et le béton, mais un tir de fusil a pompe coupe l’une des bête en deux, faisant pleuvoir sang et tripes sur le groupe, le second atterrit la gueule la première sur un bras armée, le revolver se déchargeant dans sa gorge, l’arrière de son crâne explosant dans un brouillard de sang et d’os, une rafale de pistolet mitrailleur cueille le dernier dobermans dans le flanc, changeant son saut prédateur en une spirale chaotique qui l’envoie percuter l’un des membres avec un bruit sourd,
Malgré les blessures béantes de son torse, les mâchoires se referme immédiatement sur un bras, ses dents pas assez puissante pour traverser le manteau renforcé mais la pression arrachant un grognement de souffrance a sa cible qui essaie vainement de débarrasser son bras de cet étau dentelé.
Les coups se succèdent sur le crâne canin mais ce n’est que lorsqu’une lame de couteau est plantée à travers celui-ci que la prise se relâche, la gargouille arrachant son bras couvert de salive et de sang de ce piège de chair.
“
Putain de Clébards ! C’est quoi ce bor…”
* * *
Trois explosions successives sont entendues à travers tout l’immeuble.
De l’autre côté, remontant l'escalier de secours, bien plus étroit, le second groupe cesse immédiatement sa progression. Une série de demandes radio se succèdent, sans autre réponse qu’un grésillement constant. Les gardes de l’entrée confirment que personne n’est passé en bas et la tension monte d’un cran. Des ordres sont rapidement aboyés, et le groupe se remet en marche avec une vigilance doublée, les faisceaux de leur lampes couvrant chaque direction.
Ils arrivent jusqu’au palier du douzième, en alerte absolue. La porte est ouverte d’une décharge de fusil à pompe et le groupe se glisse dans le labyrinthe de bureaux à perte de vue, les cloisons délimitant chaque zone de travail formant autant de cachette pour la menace potentielle, la progression est lente, le groupe se méfiant de possible piège explosif et le lieu étant parfait pour une embuscade. Le silence est oppressant, seulement interrompu par les bruits de lointaines explosions et les échange de coup de feu rendu quasi inaudibles par les doubles vitrages, chaque ombre est une menace, chaque recoin est une embuscade... la sueur coule sous les masques monstrueux. Presque dix interminables minutes sont nécessaire pour trouver les restes de leurs collègues.
La vision ne fait rien pour les rassurer.
La cage d’escalier est un charnier, l’odeur du sang et des excréments serait étouffante sans la protection de leur masque, des morceaux humains ayant été projeté à travers toute la monté et le mélange de fluide noirâtre dégoulinant entre les marche dans une cascade visqueuse aux grumeaux de chaire et d’os. Les murs et les marches sont criblé de bal et shrapnel et décoré d'arc d'hémoglobine, comme un Jackson Pollock monochrome. Les restes déchiquetés de chien font lever plus d’un sourcil mais les question sont laissée a plus tard, le groupe vérifiant rapidement l’absence d’hostiles aux alentours. Le silence n'est brisé que par les courtes exclamation des membre de l'équipe et le bruit humide de leur bottes s'enfonçant dans la bouillie humaine parfois entrecoupé du craquement sec d'un os broyé sous la semelle d'une rangers.
Personne ne voit que, sur deux des cadavres, les masques de gargouilles couvrent à peine d’épais colliers métaliques. L’un est appuyé contre le mur, son ventre ouvert sur des tripe dégoulinant, l’autre est intact mais sous une paire de corps déchiquetés. D’un geste mécanique, les deux marionnettes dressent leurs armes, les escalier déjà ruiné s’illuminant du feu des armes automatiques.
* * *
“
On a pas réussi à tous les tuer… et il ne nous reste plus que deux chiens et deux marionnettes.”
Sans électricité, seuls les joueurs peuvent voir ce qu’il se passe, les caméras des modules étant bien heureusement sur batterie, et la distance de contrôle est grandement réduite. L’équipe se trouve actuellement un étage au-dessus de massacre, installé aux bureaux d’une start up dont tout le monde se contrefout. Le gardien est en train d’équiper les deux dernières marionnettes des masques et des trench coats récupérés sur les victimes des chiens. Les vêtements sont couverts de sang et d’autres fluides, mais String a décidé que chaque seconde d’indécision de la part de leurs assaillant est une victoire pour eux.
On peut entendre la résignation dans la voix de Strings.
“
Active l’auto destruction.”
* * *
“
On a été embusqué, un groupe d'agents de sécurité qui se sont pris pour des héros, on va terminer le balayage.”
La garouille met quelques instants à répondre, ne reconnaissant pas la voix qui vient de répondre à sa demande d’information. La série d'explosions qui a secoué l’immeuble n’étant pas vraiment bon signe dans ce qui aurait dû être une simple opération de nettoyage. Un groupe d'agents de sécurité ? Avec des flashbang peut-être ? Il ne connaît pas tous les membres du groupe au point de discerner leurs voix par radio, mais l’explication lui laisse un mauvais goût dans la bouche.
“
On est en sous nombre, on va appeler des renforts.”
Un sourire sauvage se dessine sur ses lèvres lorsque la voix ne répond pas immédiatement.
D’un geste, il fait rapidement signe à l'un des autres garde de passer sur un autre canal pour appeler un deuxième groupe de gargouilles. Il s’est presque fait avoir, la satisfaction de ne pas s’être fait dupé n’est assombrit que par la confirmation que toute la bande est perdue.
Il ne cache pas son hostilité lorsqu’il continue, sans attendre la réponse. Alors que les armes sont soudain dirigées vers les deux cages d’escalier plutôt que vers la porte d’entrée.
“
On va appeler des renforts et on va venir vous chercher bande de rats, je ne sais pas qui vous êtes, ou qui vous croyez être mais vous ne pouvez pas échapper aux gargouilles de Gotham !”
* * *
La radio n'émet plus qu’un grésillement continu.
Cela prend tout le contrôle de soi que Renata possède de ne pas envoyer valser l’objet à travers la pièce. Tout le monde la regarde, attendant la suite du plan, attendant une idée pour les sortir de là. La réponse à l'appel radio était un pari risqué, mais le silence aurait garanti l’arrivée de renforts de toute façon. Sentant le plastique gémis dans sa poignée, la vénézuélienne le repose sur l’un des bureaux, expirant lentement pour retrouver son calme. Une partie d’elle est en totale panique, terrifiée par cette perte soudaine de tout ce qu’elle contrôle dans sa vie. Ses ressources hors de portée, ses marionnettes diminuant plus vite que ses ennemis… un groupe d’imbécile masqué essayant de prendre le contrôle de la ville par la force sans même contacter la pègre locale.
“
Si on reste ici, même si on arrive à les contenir, ils vont juste finir par mettre le feu à l'immeuble."
Tout le groupe se tourne vers la jeune femme qui vient de parler, Iris, sa chargé de communication. Elle se tortille un instant devant cette soudaine montée d’attention mais, après quelques instants, continue d’exposer son idée d’une voix tremblante, désignant la baie vitrée ouvrant sur le chaos d’une Gotham en guerre.
“
Je veux dire… on a bien vu ce qu’il se passe dehors non ? Je ne pense pas que ces gars aient quelque chose à foutre des dégâts collatéraux.”
La réalisation est glaciale.
Les regards se croisent, chacun voyant la résignation s'alourdir dans les prunelles des autres. Tous espéraient secrètement pouvoir éliminer se groupe puis se terrer en paix derrière les murs renforcés du studio, mais personne n'a envie que ces dernier deviennent leur tombaux. Tous les regards se tourne vers leur “boss”, un titre qui aurait fait rire Ren il y a quelques jours encore, se trouvant plus manageuse ou directrice - PDG étant ridicule pour une si petite opération - que chef de gang. Mais clairement, tout le monde cherche son approbation, est ce que c’est parce qu’il savent qu’essayer de rentrer chez eux séparément signe leur arrêt de mort ? Est-ce juste l’habitude de suivre ses ordres ? Est ce qu’est une réelle confiance dans sa capacité à diriger ?
La réponse importe peu. Sa respiration s’est calmée, sa voix s’est arrêtée de trembler, son regard est devenu d’acier.
Elle a le contrôle.
“
Bon, voilà ce que l’on va faire…”