Un contrat juteux

L’endroit était sombre. On distinguait à peine ce qui semblait être les murs et le plafond de cette pièce disproportionnée. Le silence dominait. Il n’y avait rien. C’était vide. Puis, une forme. Elle semblait humanoïde. Une femme ? Aucun trait de son visage n’était visible. L’ombre était anonyme. Tout à coup, une étincelle illuminait un coin de ce visage. Elle l’a reconnu immédiatement, son souffle se coupa. A peine eut-elle le temps de reprendre ses esprits que la forme entière s’enflamma. D’abord le visage, consumant dans des crépitements la chair qui s’y trouvait. Puis, le feu s’amplifia et descendit rapidement le long du cou puis des bras. En quelques secondes seulement, l’ombre n’était plus qu’une torche humaine. Le silence se brisa pour laisser place à des hurlements de douleur. Elle semblait la supplier. Elle pouvait l’entendre l’appeler.

Thalia se réveilla en sursaut. Un mauvais rêve, pour ne rien changer. Elle se redressa pour s’assoir sur son lit, camouflant sa tête entre ses mains encore tremblante. Ce n’était rien qu’un mauvais rêve.  Elle leva la tête et observa tout autour d’elle. Rien n’avait bougé. Ses murs, initialement blancs, étaient couverts d’articles en tout genre parlant des différentes créatures qui peuplaient la ville. Elle avait toujours eu une certaine fascination pour les déviants de la race humaine et ce dont ils étaient capables. La plupart étaient annotés, de gros cercles rouges mettaient en valeur certaines phrases ou certains mots. Parfois, des choses étranges étaient suspendues à ces articles comme des écailles, des griffes ou tout autre trophée qu’elle avait jugée utile d’afficher. Du sang séché semblait recouvrir certains de ces butins.

Sa chambre était immense. A vrai dire, l’appartement où elle logeait était immense. Si le carcajou se fichait pas mal de dormir dans un carton où en plein milieu d’une ruelle, Thalia aimait avoir un certain niveau de confort. C’est pourquoi sa chambre contenait un grand lit, une bibliothèque remplit de livres parlant des arcanes et de leur histoire, un bureau avec un ordinateur portable dernier cri, un dressing rempli d’armes en tout genre (et de quelques vêtements), et bien sûr, une porte menant à sa salle de bain personnelle. Elle n’était pas vraiment matérialiste, à vrai dire elle passait plus de temps à acheter des armes diverses et variées qu’à vouloir un magnifique appartement mais elle aimait l’idée d’avoir de la place pour entreposer son matériel et ses trophées.

Il lui fallut quelques secondes pour reprendre ses esprits, analyser la pièce et sortir de son lit. Elle traversa sa chambre pour se rendre au salon. Pas de Jameson. Sa veste fétiche ne traînait pas sur le canapé, là où il avait l’habitude de la jeter. Là où cette veste se trouvait, il y avait Jameson. Il ne la quittait jamais, et ça malgré le trou qui y trônait en plein milieu. Une petite trace, à peine plus grande qu’une marque de cigarette…L’absence du carcajou laissait la jeune femme indifférente, elle avait l’habitude de ses escapades et, tant qu’il rentrait seul et sobre, c’était déjà un bon point.

Elle se dirigea vers le frigo, prête à grignoter le moindre bout de fromage qui traînerait. Vide. Des bières jonchaient les différents étages mais pour le reste, rien. Ce n’ai pas comme s’ils aimaient réellement faire des courses. De dépit, elle alla se vautrer sur le canapé, contemplant le plafond. Elle sortie une cigarette de sa poche, autant en profiter vu qu’il n’est pas là. Du bout de ses doigts, elle l’alluma et tira dessus, attrapant le cendrier au passage. Pas question de laisser une quelconque preuve de son méfait. Tout était si calme. On entendait à peine les bruits de la ville d’ici. Comme quoi, vivre au dernier étage avait quelques avantages.

Soudain, des bruits de pas cassèrent son doux moment de méditation. Quelqu’un arrivait.

Codage par Libella sur Graphiorum

Un contrat juteux

Elle n’avait pas besoin d’être sur ses gardes, elle savait qui arrivait. Pas besoin non plus qu’il s’annonce, elle pouvait le reconnaître rien qu’à son odeur. Un mélange étrange de sang, d’entrailles, de parfums bons marchés et de diverses choses dont elle ne préférait pas savoir la provenance. Il lui fallait une douche, c’est clair, mais elle en avait l’habitude. Il n’arrivait pas une seule fois où le Glouton rentrait dans cet appartement sans avoir une odeur des plus repoussantes sur lui. C’était à la fois écoeurant et familier. Presque rassurant à force. Il ne lui fallut qu’un claquement de doigts pour éteindre sa cigarette et une fraction de seconde pour l’écraser et dissimuler grossièrement le cendrier sous le canapé. A quoi bon après tout, il s’en doutait, mais elle le faisait pour la forme, comme une ado qui serait surprise en flagrant délit. Il allait être bientôt 6h du matin et le soleil n’allait pas tarder à se lever. L’heure de s’endormir pour le carcajou en somme, et l’heure poru Thalia de prendre son café avant d’aller travailler afin d’honorer les quelques contrats qui lui restaient.

Après quelques minutes, le géant s’effondra sur le canapé, au côté de sa protégée. L’odeur lui saisissait le ventre, lui tournait les boyaux, comme à chaque fois. Elle était habituée mais la sensation était la même à chaque fois. Elle préférait largement l’odeur de tabac froid qui tournoyait encore autour d’elle. Discrètement, elle sorti un petit désodorisant d’un meuble adossé au canapé et en vaporisa un peu autour d’elle afin de rendre le tout plus supportable. Mais, comme d’habitude, cela ne suffisait pas. Il lui fallait une douche. Alors qu’elle allait s’empresser de lui suggérer l’éventualité de deux ou trois douche à grand coup de karcher, il ouvrit la bouche :

- Un million de dollars, déclara-t-il.

Sans plus, sans rien ajouter, il avait jeter la phrase dont le nombre pesait encore sur l’atmosphère de la pièce. Un million. Qu’est-ce qu’on peut faire avec un million ? Thalia voyait déjà une toute nouvelle pièce, adossée à sa chambre, où ses armes pourraient se reposer en attendant d’être utiliser. Elle pourrait même avoir une bibliothèque entière plutôt que de se contenter d’entasser ses bouquins dans un simple meuble. Oh ! Et ils pourraient même avoir plusieurs appartements ! Plusieurs QG pour éviter de se déplacer constamment à travers la ville. Peut-être même un appartement dédié uniquement à l’étude des spéciments qui peuplent la ville ! Oui, elle pourrait y entreposer certaines de ses victimes pour les étudiers avant de les tuer et de valider ses contrats.

Des idées fusaient à travers son esprit, mais ils furent vite interrompu par la réalité. Un million…Qui avait les moyens dans cette ville de dépenser autant ? Et surtout...pour quoi ? Un million de dollars, cela voudrait dire que le contrat doit être bien complexe ou dangereux, pas que cela dérange Thalia mais ça sentait un peu l’arnaque…L’appart du gain est une chose, mais contre quoi ? Que pouvait bien demander leur cher client en échange ?

- Quelqu’un qui est prêt à dépenser un million...Peut-être peut-il dépenser un peu plus ? Peut-être que l’on peut négocier plus ? Pensa-t-elle à mi-voix.

A vrai dire, l’esprit de la jeune femme était partagé entre cette somme astronomiquement louche qu’un inconnu était prêt à dépenser et l’appart du gain, peut-être pouvaient-ils en tirer plus. Au moins pour avoir une chambre pour ses armes et un appartement pour étudier ses victimes ? Elle en oublia même l’odeur pesante qui empestait la pièce entière.

- Un million...Qu’est-ce que t’es allé foutre encore Jameson ?.

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Un contrat juteux

Décidément, les mafieux commençaient petit à petit à sortir de l’ombre à Gotham. A peine avait-elle finit de s’entretenir avec Benny Smiles au sujet de Falcone et du Pingouin que Jameson débarquait tout puant et gluant pour lui annoncer un nouveau contrat. Elle avait bien fait de décliner l’offre initiale du dandy vu ce qu’il venait de lui annoncer. Thalia n’avait aucune peine à imaginer ce que l’homme avait pu proposé au carcajou pour le convaincre, outre une tonne de billets verts. A vrai dire, elle était bien contente de ne pas avoir pû assister à cette négociation de contrat. Mais elle chassa rapidement ces idées répugnantes de la tête et se concentra plutôt sur les termes de cette nouvelle mission.

Une guerre, ni plus ni moins. Au moins, ce nouveau chapitre allait les sortir du train train habituel. Les contrats s’enchainaient plutôt bien mais ils avaient tendance à se ressembler et devenaient quasiment indistinguables les uns des autres. Tant que l’argent l’attendait à la sortie, cela convenait à Thalia. Mais il est vrai qu’un peu d’action, ajoutée à beaucoup de zéros bien sûr, ne pouvait pas leur faire de mal.

Trimballant sa puanteur d’un endroit à l’autre, le carcajou finit par daigner d’aller se prendre une douche (ou deux). Hors de question de laver les lambeaux de vêtements qui le couvrait auparavant, dès qu’il sortirait de la salle de bain, la jeune rouquine brûlerait ça directement dans la benne. Ce n’était pas la première fois qu’elle ferait appel à ce genre de procédé, ni la dernière malheureusement connaissant son colocataire et ses habitudes de vie. Disons que l’hygiène ne faisait clairement pas partie des priorités du méta. Alors qu’il finissait sa douche, elle en profita pour aller se chercher une bière et ouvrir en grand les fenêtres de l’appartement.

Elle l’attendit sagement dans un fauteuil, non loin du canapé, attachant sur le point le plus haut de son crâne sa longue chevelure rousse. Elle avait l’impression d’empester depuis qu’il était de retour dans leur appartement. Il daigna sortir de son antre.

- Pas mal pour un début de journée à ton âge. Vu l’état dans lequel tu es revenu, j’imagine que le contrat a déjà été conclu. C’était donc lié à ça l’odeur ignoble que tu as décidé de porter aujourd’hui ?

Elle regardait le canapé comme si l’odeur pouvait se matérialiser en une brume verdâtre et pensa, pendant une seconde, à le brûler en même temps que les vêtements. Après tout, avec l’argent qu’ils allaient se faire, ils pourraient s’en acheter une tonne d’autres, non ?

- Bon. Une guerre, d’accord, pourquoi pas, mais l’argent on le touchera quand ? Parce que si c’est pour perdre et ne jamais en profiter, aucun intêret, j’veux une avance moi, histoire d’en claquer une partie avant d’aller risquer ma vie. Pas que cela me dérange cela dit.

Elle réfléchissait à tout ça, un accès illimité à l’Iceberg loundge, pourquoi pas après tout. Les filles ne l’intéressaient pas du tout mais elle savait que cela avait dû être l’argument phare pour convaincre Jameson lors de son entretien avec le Pingouin. L’homme n’est pas si difficile à amadouer après tout. L’alcool et la nourriture gratuits par contre, cela réduirait drastiquement leurs dépenses ! A deux, plus de la moitié de leur salaire finit par tomber inévitablement dans la boisson et des plats à emporter bien gras. Quant au bunker…Disons que cela pourrait s’avérer très utile pour la jeune sorcière lorsque l’envie lui prendra de tester de nouvelles runes ou de prendre le carcajou pour cobaye.

Perdue dans ses réflexions, elle chercha son paquet de cigarettes qui s’était glissé sous un coussin du canapé. Il était à moitié écrasé et le tabac tombait en miette sur le tapis dès qu’elle l’ouvrit. Elle s’empressa de le disperser avec ses pieds, ni vu ni connu, et alla s’assoir sur le bord de la fenêtre. Sans l’allumer, elle joua avec une cigarette tout en contemplant la vue que lui offrait sa position. Puis, elle se tourna vers Jameson.

- Bon, on commence quand ?

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